Jusqu’au 13 mars 2016, la nature morte est à l’honneur au Musée Regards de Provence. Du XVIIIe siècle à aujourd’hui, les oeuvres exposés sont variées : des dessins, tableaux, photographies et sculptures, successivement modernes, romantiques, impressionnistes et contemporaines. En tout, une centaine d’oeuvres se succèdent, sur ce thème bien connu de l’histoire de l’art, donnant à voir l’évolution de son traitement pictural par les artistes au fils du temps.
La pratique de la nature morte remonte à l’Antiquité, le peintre Zeuxis étant certainement un des exemples les plus fameux : si son oeuvre est aujourd’hui totalement perdue, elle est abondamment citée dans les textes car il était considéré comme l’un des plus grands peintres de l’Antiquité et initiateur du trompe-l’oeil. La légende raconte que ses grappes de raisons étaient si bien peintes que les oiseaux venaient les picorer…
Pourtant, si la pratique a plus ou moins traversé les siècles, le genre de la nature mort ne sera fixé qu’au XVIIe siècle, et le nom encore un siècle plus tard. Jusque là, on parlait de choses naturelles (cosa naturali chez Vasari), nature immobile (still-leven au Pays-Bas, still-life en Angleterre), ou nature inanimée sous la plume de Diderot… L’expression « vie silencieuse », qui donna son nom a l’exposition, a quelquefois été utilisée, et donne une toute autre connotation : si la nature est figée, immobile, elle n’est pas pour autant morte. C’est le talent du peintre qui ajoute le vivant et le mouvement à cette nature immortalisée dans la matière picturale. Comment donner une âme à un simple objet ? La composition et la mise en scène des natures mortes deviennent ainsi un véritable exercice, nécessitant une certaine virtuosité technique de la part de l’artiste.
Bouquets de fleurs, coupelles de fruits, tables dressées, souvent agrémentés d’objets divers ou d’animaux, la nature morte se révèle être un genre abondant, qui séduit les artistes les plus variés, dans chaque époque.
La vanité n’est pas en reste : genre particulier de la nature morte, elle est chargée d’une valeur morale et symbolique. Basé sur un système d’allégories, elle a pour but d’engendrer une réflexion sur les plaisirs terrestres, la fragilité de l’existence humaine sur Terre, le caractère inéluctable de la mort… « Vanité des vanités, tout est vanité ! »
Le point fort de l’exposition est sa richesse : des somptueuses compositions de Meiffrein Comte, Pierre Nicolas Huilliot, Antoine Volon et Jean-Baptiste Olive, aux plus originales de Bernard Buffet, Maurice Vlaminck ou Raoul Dufy, et même Ambrogiani… La sculpture a aussi sa place : l’artiste contemporain Nicolas Rubinstein, résidant à Marseille, revisite notamment la vanité avec son crâne aux oreilles de Mickey, très belle pièce en bois et résine qui fait côtoyer la réalité et la fiction, et évoque une certaine esthétique des cabinets de curiosités…
Mon coup de coeur : la très belle huile sur toile de Jean-Baptiste Olive, peintre marseillais du XIXe siècle. Il fait une composition savante qui allie avec justesse les couleurs et le rendu des matières, avec un sens inouïe du détail. Cette peinture s’inscrit dans la tradition de la nature morte hollandaise. Les jumelles, l’éventail en dentelle, la petite sculpture ainsi que les perles renvoient à des activités considérées comme futiles et bourgeoises, comme par exemple le théâtre. Les fleurs et la lettre timbrée évoquent plutôt l’éphémère et le temps qui passe… on se retrouve donc bien en présence d’une vanité.
Pour conclure, une exposition charmante, qui éveillera tous vos sens…
http://www.museeregardsdeprovence.com/exposition/vies-silencieuses
Très belle sélection ! Petit contribution au sujet « Vanité » série à laquelle je travaille en ce moment. Découvrir une version plus environnementale de la nature morte : https://1011-art.blogspot.com/p/vanite.html