Vous n’avez pas pu y échapper, l’affiche a inondé les panneaux publicitaires et les réseaux sociaux depuis quelques semaines : le Mucem présente, à partir du 27 avril 2016, sa grande exposition sur Picasso. Intitulée « Un génie sans piédestal », selon la formule de Michel Leiris en 1988, l’exposition s’attache à montrer l’oeuvre de l’artiste sous un angle encore méconnu : celui des arts et traditions populaires. 270 oeuvres sont exposées, selon un parcours divisé en quatre sections :
- Picasso et la vie quotidienne : les racines
- Des objets et des thèmes fétiches
- Les techniques et leurs détournements
- L’objet matériau
Autrement dit, un parcours tout aussi riche que pertinent, qui permet un vaste tour d’horizon sur le sujet. Le lien avec le Mucem est intéressant, puisque le musée tire une bonne partie de sa collection de celles du Musée des Arts et traditions populaires de Paris, fermé en 2005. On connait aussi l’attachement de l’artiste à la Méditerranée.
Si tout le monde connait Picasso pour ses oeuvres cubistes, il est judicieux de rappeler ses origines espagnoles, ses oeuvres de jeunesse, où il s’inspire de son quotidien pour nourrir son art. Ainsi, l’exposition s’ouvre avec une série de petits ex-votos, avant de se consacrer plus longuement à ses objets et thèmes fétiches.
Les coiffures et costumes populaires, la musique, le cirque, la tauromachie… tout cela appartient à un univers populaire et folklorique qui résonne de façon importante dans la peinture de Picasso. De nombreux portraits féminins montrent son attention particulière aux accessoires comme les coiffes en dentelles, catalanes ou arlésiennes.
De même, les instruments de musique, et en particulier la guitare, symbole de l’identité hispanique et icône de la musique populaire, peuplent ses oeuvres. Avec le thème du cirque, c’est un ensemble de masques et de figures colorées de saltimbanques qui sont présentés, inspiration évidente du peintre. Ce qui l’attire, c’est toute cette iconographie festive, liée au spectacle, qui fait également écho à l’univers de la tauromachie. Emblème absolu de l’Espagne, la tauromachie occupe une grande place dans son oeuvre et dans l’exposition, puisque la scénographie reprend ici la forme circulaire de l’arène, où matadors et taureaux paradent.
Les jouets et la colombophilie ne sont pas en reste. Après la Seconde Guerre mondiale, Picasso va tour à tour expérimenter diverses techniques artisanales, qu’il intègre à ses recherches plastiques. L’exposition se concentre alors sur chaque technique, liée à une rencontre faite par Picasso, qui profite du savoir-faire de l’artisan ou de l’atelier pour proposer une oeuvre bien personnelle. Le bois, la céramique, l’orfèvrerie, mais aussi le textile, le métal et le béton, Picasso touche à tout et toujours avec talent. Le nombre de pièces à voir à ce niveau de l’exposition est ainsi conséquent, et montre bien l’immense étendue de son oeuvre.
Les sculptures qui suivent et clôturent l’exposition questionnent quant à elle la question de l’objet, du ready-made, et du statut de l’oeuvre d’art. Picasso utilise en effet des objets du quotidien pour créer des sculptures d’assemblage, dont les plus célèbres sont la Tête de taureau et La guenon et son petit. À travers ce geste iconoclaste, Picasso sacralise l’objet populaire, de la vie quotidienne. L’exposition propose véritablement une nouvelle grille de lecture de l’oeuvre de l’artiste, qui plus que jamais, apparait comme un « génie », ou au moins un géant qui a su s’approprier tous les médiums qu’il rencontrait.
« Il ne s’agit pas pour lui de faire du bricolage, mais de traduire le pouvoir évocateur de l’objet. »
« L’art oblige l’artiste à ne pas s’isoler; il le soumet à la vérité la plus humble et la plus universelle. C’est pourquoi les vrais artistes ne méprisent rien. » Albert Camus
L’exposition est donc loin d’une simple rétrospective de l’oeuvre de Picasso, mais montre un réel questionnement sur le rapport de l’artiste au monde qui l’entoure. Oeuvre aux milles et une facettes, véritable caméléon, il y en a pour tous les gouts.
Du 27 avril au 29 aout 2016.
Mucem, 1 esplanade du J4
Pour en savoir plus : mucem.org
C’est clair et juste, cela donne presque envie d’y retourner 🙂
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